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mercredi 8 septembre 2021

Il est grand temps de rallumer les étoiles, de Virginie Grimaldi


Titre : Il est grand temps de rallumer les étoiles
Autrice : Virginie Grimaldi
Edition : Fayard
Parution : 02/05/2018
Nombre de pages : 396
Coût : 18,50 €






4ème de couverture : 

Anna, 37 ans, croule sous le travail et les relances des huissiers.
Ses filles, elle ne fait que les croiser au petit déjeuner. Sa vie défile, et elle l’observe depuis la bulle dans laquelle elle s’est enfermée.
À 17 ans, Chloé a des rêves plein la tête mais a choisi d’y renoncer pour aider sa mère. Elle cherche de l’affection auprès des garçons, mais cela ne dure jamais. Comme le carrosse de Cendrillon, ils se transforment après l’amour.
Lily, du haut de ses 12 ans, n’aime pas trop les gens. Elle préfère son rat, à qui elle a donné le nom de son père, parce qu’il a quitté le navire.
Le jour où elle apprend que ses filles vont mal, Anna prend une décision folle : elle les embarque pour un périple en camping-car, direction la Scandinavie. Si on ne peut revenir en arrière, on peut choisir un autre chemin.

Avis : 

 J’ai lu peu de livres de Virginie Grimaldi, mais je ne sais pas pourquoi, ma tête les associe aux vacances. Un entrelacs de vies, une place importante pour la famille, une fin agréable, bref, une explosion de vie.

J’ai passé un très bon moment avec Il est grand temps de rallumer les étoiles. Anna, mère de Chloé 17 ans et Lily 12 ans, se retrouve dépassée. Au chômage alors qu’elle n’a pas de compétence particulière, croulant sous les dettes, elle se rend compte que ses filles vont mal. Alors ni une ni deux, elle les embarque dans un road trip vers la Scandinavie.


" Les parents sont des funambules. On marche sur un fil tendu entre le trop et le pas assez, un colis fragile entre les mains.
Il faut être attentif, mais ne pas laisser croire à notre enfant qu'il est le centre du monde; il faut lui faire plaisir sans qu'il devienne blasé; il faut équilibrer son alimentation sans le priver; il faut lui donner confiance, mais qu'il reste humble; il faut lui apprendre à être gentil, mais à ne pas se laisser faire; il faut lui expliquer les choses, mais pas se justifier; il faut qu'il se dépense et qu'il se repose; il faut qu'il apprenne à aimer les animaux, mais à s'en méfier; il faut jouer avec lui et le laisser s'ennuyer; il faut lui apprendre l'autonomie tout en étant présent; il faut être tolérant mais pas laxiste; il faut être ferme mais pas rude; il faut lui demander son avis, mais pas le laisser décider de tout; il faut lui dire la vérité sans atteindre son innocence; il faut l'aimer sans l'étouffer; il faut le protéger, mais pas l'enfermer; il faut lui tenir la main tout en le laissant s'éloigner." 

En ce moment, nombres de mes lectures utilisent l’alternance de point de vue. Ici, nous avons Anna qui narre, Chloé qui raconte sa vie sur son blog Les Chroniques de Chloé et Lily qui raconte la sienne dans son journal Marcel. Trois voix, trois façons de raconter. 


J’ai adoré lire Lily, ses expressions rigolotes m’ont bien amusée, ses PS à la fin de chaque page, le « Cher Marcel »… Elle avait un mélange de maturité et d’innocence impressionnant. Elle me faisait rire, j’avais envie de la protéger. J'ai aussi beaucoup aimé sa relation avec Noé, une véritable leçon sur l'amitié et la tolérance.


Je me suis beaucoup identifiée à Anna. Anna et ses attaques de panique qu’elle narrait avec une justesse incroyable. La peur de la peur, c’est exactement ça, les deux cerveaux qui se battent, le sentiment merveilleux d’avoir surmonté cela. 


« En réalité, je n’ai pas peur de tomber en panne ou d’être cambriolée. Je crains de faire une attaque de panique et de ne pas réussir à la gérer. Je redoute de perdre connaissance et que mes filles se retrouvent seules. Je suis terrorisée à l’idée de ressentir ces symptômes terribles, les symptômes de la peur. En fait, j’ai pas peur d’avoir peur. J’ai peur de moi. »


Lire ces mots m’a fait à la fois replonger dans mes crises et m’en a sortie. Je me suis sentie faible puis plus forte, grandie. J’ai lu le mal que ressentait Anna, comment elle vivait avec ça et comment ses filles vivaient en spectatrices de ces attaques. J’ai aimé que cela soit abordé par petites touches, avec humour et justesse. 


Je me suis aussi identifiée à Chloé. Hypersensible, en décalage avec le monde et pourtant vivant le monde si intensément. Contrairement à plusieurs héroïnes décalées, Chloé ne cherche pas à renforcer ce fossé avec de la provocation, elle cherche à s’adapter. Et elle souffre de cette différence. Elle a un côté naïf, son désir d’être aimée est si beau, si enfantin, si douloureux aussi d’une certaine façon car trop peu de personnes peuvent combler un besoin d’amour si grand. 


« On venait de se faire mettre KO par la beauté du monde. »


Assise dans le train, j’ai voyagé avec Il est grand temps de rallumer les étoiles. J’ai découvert des paysages magnifiques, des personnages chaleureux. J'ai beaucoup apprécié les autres camping-caristes, petites touches de vies, d'humour, de troubles, de remises en question. Mention spéciale aux deux petits papis. Bref, je faisais partie du road trip, et j’aime entrer dans ma lecture de cette façon. Je me suis sentie proche de la nature, comme si Virginie Grimaldi m’ouvrait les yeux à travers ceux de Chloé, Anna et Lily. Les descriptions des paysages et l’émerveillement des filles étaient beau à lire. Ca et voir cette famille se ressouder doucement. 


Virginie Grimaldi offre une très belle leçon de vie à ces personnages, et à nous aussi par la même occasion, ajoutant humour et émotions. Je suis étonnée d’avoir autant apprécié ma lecture. En y repensant, un sentiment d’apaisement me vient, je revois les magnifiques paysages que les filles ont traversé. Une petite déception peut-être concernant Julien, mais c’est vraiment pour chercher la petite bête. 


Un roman feel good plein d'amour et de beauté qui donne envie de croquer la vie à pleines dents avec les gens qu'on aime. Une lecture fraiche, vivante qui fait du bien. 


« J’ai l’impression que nous sommes tous à bord d’un bus qui avance inexorablement vers une destination commune. On s’y croise, on s’y perd, on s’y accompagne parfois. Certains en descendent avant le terminus. On ne peut pas le freiner, on ne peut pas l’arrêter quelques instants, on peut juste faire en sorte de s’y sentir le mieux possible.

(…)

Mais je devine déjà l’intersection. Elle approche de plus en plus vite. Chloé va changer de siège. Lily aussi un jour. »



Avertissements : 
(surligner pour voir, cela peut potentiellement divulguer l'intrigue)

violences conjugales -  attaques de panique

mercredi 1 septembre 2021

Annie au milieu, de Emilie Chazerand


Titre : Annie au milieu
Autrice : Emilie Chazerand
Edition : Sarbacane
Collection : Exprim'
Parution : 25 août 2021
Nombre de pages : 312
Coût : 17€






4ème de couverture : 

Velma et Harold sont le frère et la sœur d’Annie.
Annie est « différente ». C’est comme ça que les gens polis disent. Elle a un chromosome en plus. Et de la gentillesse, de la fantaisie, de l’amour en plus, aussi. Elle a un travail, des amis et une passion : les majorettes.
Et Annie est très heureuse parce que, pour la première fois, sa troupe aura l’honneur de défiler lors de la fête du printemps de la ville.
Mais voilà, l’entraîneuse ne veut pas d’elle pour cet événement : elle n’est pas au niveau, elle est dodue… Bref : elle est « différente ».
C’est bête et méchant. Ça mord Annie et les siens, presque plus. Alors, qu’à cela ne tienne : Annie défilera, avec son équipe brinquebalante, un peu nulle mais flamboyante.
Ses majorettes un peu barjo. Ses barjorettes, quoi.



Avis : 

Merci aux éditions Sarbacane pour cet envoi 

Qu’est-ce qui m’a marquée dans Annie au milieu de Emilie Chazerand ? La polyphonie du texte : Velma, Annie, Harold, Velma, Annie, Harold, et ainsi de suite. Chacun sa voix, sa façon de parler, sa vie, ses yeux. Cela m’a vraiment donné l’impression d’un roman familial. J’ai aimé ces trois regards, je pense que j’ai préféré celui de Velma, poétique comme je les aime en ce moment. Des phrases courtes qui reviennent à la ligne, un cynisme d’ado désabusée, un coeur gros comme la Terre. Distincte de la voix d’Annie, enfantine, avec des fautes, mignonne bien que parfois dérangeante. Et puis distincte aussi de celle d’Harold, l’aîné, qui avait un langage plus habituel si je puis dire. Cette alternance de points de vue a vraiment rendu le roman dynamique.

Ca, et la plume fluide d’Emilie Chazerand. J’ai lu la moitié du roman d’une traite, je ne pouvais plus m’arrêter. Je le lisais en lecture commune avec les partenaires de Sarbacane. J’ai peu lu au début, je n’ai pas pris le temps, et puis en une après-midi, ce fut presque bouclé. On peut dire que je n’ai pas du tout respecté le planning de lecture commune. Néanmoins, m’imaginer en communion avec les autres m’a aidé. J’avais commencé à le lire plus tôt, mais les trois premiers chapitres se passant pendant un enterrement m’avaient essoufflée. Trop d’émotions, trop de douleurs, trop de mauvais souvenirs.


L’histoire m’a semblé réaliste, même si, ne connaissant pas cette situation, je ne peux pas juger. Je peux imaginer que Velma et Harold se soient effacés pour Annie. Mais j’ai trouvé cela si dur à lire, les voir passer au second plan, spectateurs de leur propre vie. J’avais envie de leurs crier « Vivez ! Vous avez le droit d’être heureux, d’être égoïste parfois, vivez ! ». Parce qu’ils ont beau aimer Annie d’un amour inconditionnel, cette petite soeur au chromosome en plus prend de la place. J’ai eu l’impression que l’autrice dépeignait avec justesse la vie d’une famille avec un enfant trisomique, comment cela les impacte tous, comment Annie peut créer des tensions, des conflits et les résoudre en un sourire, comment ils peuvent lui en vouloir et l’aimer en même temps.


Et l’amour, c’est la principale composante de ce roman. Il ressort à travers les pages et dans la fin choisie. Bien que j’ai aimé ce happy end, je me demande si ce n’est pas un peu simple, un peu rapide. Mais ça m’a fait du bien, ce bonheur rayonnant, un peu comme un deus ex machina après la tempête.


Annie au milieu a été une très bonne lecture, mais ce n’est pas un coup de coeur, frôlé peut-être, mais pas un coup de coeur et pour plusieurs raisons.


Comme dit plus haut, j’ai vraiment vécu l’enterrement, c’était si fort de revivre cet évènement douloureux. Après ce souffle d’émotions, j’aurais pensé vivre le reste de l’histoire avec autant de force, et ce ne fut pas le cas. De plus, je ne me suis pas attachée aux personnages de Velma et Harold. Je voulais tellement les secouer que cela m’agaçait. Quant à Annie, impossible de ne pas la trouver attachante.


Quoiqu’il en soit, je trouve cela extrêmement important d’avoir un livre ado abordant le thème du handicap, de la trisomie 21, de ses impacts sur l’entourage. Emilie Chazerand a réussi à le faire sans tomber dans le pathos, le documentaire ou le cliché. Annie au milieu est un roman pétillant, dynamique, vibrant d’humour et d’amour.

 

Avertissements : 
(surligner pour voir, cela peut potentiellement divulguer l'intrigue)
décès d'un proche - enterrement